jeudi 27 octobre 1994
Les attentions
lundi 24 octobre 1994
Sine qua non
Sine qua non
Plus de désir
Plus de pensée
Plus d'élixir
À déguster
C'est explicite
Sine qua non
Passage, transit
La voie est bonne
Plus de hasard
Plus de secret
Papier buvard
Sur nos décrets
C'est explicite
Sine qua non
Plus rien excite
Plus rien étonne
Plus de patience
Plus d'attention
Accoutumance
À la dérision
C'est explicite
Sine qua non
Accord tacite
On s'empoisonne
Pas d'avenir
Plus de passé
Les souvenirs
Sont dépassés
C'est explicite
Sine qua non
La fin s'invite
Et nous ordonne
Plus de promesse
De jalousie
Plus de faiblesse
D'inassouvi
C'est explicite
Sine qua non
Idée construite
Qui nous bâillonne
Plus de demain
Et plus d'hier
Plus de chagrin
Plus de mystère
C'est explicite
Sine qua non
On le récite
On se sermonne
Plus rien du tout
Plus rien de rien
Un point c'est tout
Venu à point
C'est explicite
Sine qua non
Sortie, l'exit
On abandonne
Iso Bastier
24/10/94
samedi 22 octobre 1994
Le marécage
Le marécage
Je ne sais plus où vont les choses
Je ne sais pas où va le temps
Porté par ce climat morose
Qui s'incline et qui s'étend
Les rues sont pluvieuses et sordides
Errantes, brumeuses et désertiques
Aux ombres pressées et timides
Qui filent dans un vent de panique
Tu faisais des détours nocturnes
Dans la ville encore vivante et sûre
Tantôt familière, tantôt taciturne
Parure parée, armure de murs
Tu dormais contracté en elle
Les cheveux couvrant le visage
Voyageur flou ou ménestrel
Vendant à qui veut ses images
Mais tu t'es montré infidèle
Lui préférant d'autres contrées
Les envies qui donnent des ailes
Ne cessent de se déployer
Tu l'as quittée sans au revoir
Sans même un geste de dépit
Sans lui jeter aucun regard
Pas une parole, pas un crédit
Tu l'as leurrée à contre-jour
D'un matin par trop fatigué
Prétextant d'aller faire un tour
Heure du retour non précisée
Ses occupants ensommeillés
Au réveil sourd, inexorable
L'ont remuée, l'ont bousculée
À coup de pieds et de cartables
La ville s'est repliée d'un coup
Sur la grisaille de ses pensées
Pleurant sur elle, déchirant en tout
Ce qui passait à sa portée
Elle a éteint ses lumières
Rétréci les murs, les quartiers
Formant un sinistre sanctuaire
D'hommes abêtis et meurtriers
Ne sais pas où va le temps
Où s'arrêtent les métamorphoses
Ni la colère des éléments
Quand c'est la terre qui explose
Les rues heureuses et candides
Qui s'illuminaient sur ton passage
N’ont plus de cœur, taries, arides.
La ville n'est plus qu'un marécage.
Iso Bastier
22/10/1994
jeudi 20 octobre 1994
Agoraphobia
Agoraphobia
Saurais-tu rester libre
Ailleurs qu'entre tes murs
Qui te créent un équilibre
Qui te font une armure ?
Saurais-tu marcher droit
Sur les trottoirs usés
Partir loin de chez toi
Sans trop paniquer ?
Tu n'y penses jamais
Tu as peur du dehors
Les gens y sont mauvais
Sauf dans tes décors
Les femmes sont pressées
Elles n'ont plus de regard
Qu'une montre hérissée
Au bras comme un radar
La ville est grise et sombre
Peu sure, mal éclairée
Parcourue de mille ombres
Aux allures débranchées
Tu vois par la fenêtre
Les phares de la police
Pour un crime peut-être
Une lumière en hélice
Saurais-tu rester libre
Ne plus être prisonnier ?
Serait-ce dans tes fibres
De rester enfermé ?
Tu ne rêves jamais
De dépasser ta porte
De laisser tes objets
Que le vide l'emporte
Le soleil se fait rare
Il ne passe presque plus
Ou alors au hasard
Sans t'avoir prévenu
Tu reçois des nouvelles
Par la télévision
Rien de personnel
Que d'étranges visions
Tout te semble irréel
Inventé, dérisoire
La vie est plus belle
Rangée dans tes tiroirs
Bien trop de violences
De guerres si proches
Tu veux de l'innocence
Les mains dans les poches
Alors tu restes là
À compter les minutes
À dormir quelquefois
Le corps encore en lutte
Tu lis beaucoup aussi
De la science-fiction
Qui génère des soucis
Posant trop de questions
Où le monde en est-il ?
Comment vivre ainsi ?
Ça te paraît débile
Et ton œil s'obscurcit
Saurais-tu marcher droit
Sans qu'on tienne ta main ?
Être seul dans un endroit
Qui ne te dirait rien ?
Tu ne veux pas savoir
Tu te sens mal à l'aise
Ça te donne le cafard
Tu te lèves de ta chaise
Pour regagner ton lit
Y chercher le sommeil
Qui procurera l'oubli
Sans donner de conseil
Même dans tes songes
Tu ne sors pas pour voir
Les angoisses te rongent
Tourments et cauchemars
Tu te réveilles en sursaut
Tu regardes autour de toi...
Ton armoire... Ton bureau...
Tout va bien, tout est là.
Iso Bastier
20/10/94