vendredi 20 octobre 2023

À l'ouest



À l'ouest

 

Pourquoi rester ?

J'ai des pieds

Et appris à marcher

Avant tout le reste

 

Oui j'ai dormi

Rêvé de mon esprit

J'ai pleuré puis souri

Avant d'enfiler ma veste

 

Pourquoi manger ?

J'ai déjà digéré

Ton poison inoculé

Le choléra et la peste

 

Oui j'étais soumis

Je vivais à crédit

J'étais un homme gris

Un élément du test

 

Pourquoi continuer  ?

Je n'y ai gagné

Que de quoi subsister

C'est manifeste

 

Oui on m'a promis

Un avenir réjoui

Si je crois, si je prie

Un lendemain céleste

 

Pourquoi m'infliger

Cet espoir ressassé ?

Mon présent sacrifié

Enfin proteste

 

Cette fois c'est fini

J'ai trop nourri

Les meneurs, les nantis

Qui nous détestent

 

Pourquoi saigner ?

Pour mieux donner

De l'or et des trophées

À ceux qui nous délestent

 

Est-ce que je vis

Pour connaître l'oubli

Demeurer un petit

Parmi les modestes ?

 

Ou pour progresser

Profiter et aimer

Être et avoir été

Autrement qu'à l'ouest ?

 

 

Iso Bastier

20/10/23


jeudi 19 octobre 2023

Tapenaze



 

Tapenaze

 

Place de la Nation

Par un soir d'hiver

Réverbères et néons

Faisaient vibrer l'air

 

Devant nos cafés

Assises en vitrine

Nous ne faisions que parler

Entre copines

 

Quand depuis le trottoir

Baigné d'obscurité

M'attira un regard

Sur moi concentré

 

Se tenaient immobiles

Un homme et son chien,

Un colley docile.

Ils me regardaient bien

 

Le grand homme chapeauté

Inclina la tête

Avant d'oser entrer

Accompagné de sa bête

 

« Puis-je m'asseoir ? »

Dit-il en le faisant

 « Je suis venu vous voir

Depuis le lac Léman »

 

Il prit ma main ouverte

En contempla les lignes

Les lèvres entrouvertes

D'une voix sibylline

 

Me dit : « Vous écrivez

À la lueur d'une bougie.

Vous y êtes destinée...

Reprenez vos écrits »

 

 « Virginia Woolf avait

Une main identique...  »

Ses yeux étincelaient

Dans l'ambiance magique

 

 « Ne vous laissez pas influencer

Écrivez coûte que coûte »

Puis il s'est relevé

Et a repris sa route.

 

 

Iso Bastier

19/10/23

mercredi 18 octobre 2023

Moisissure



Moisissure

 

Dans la cave sombre

Des secrets sous scellés

S'agite ton ombre

Par l'opprobre oppressée

 

Dans ce silence humide

Qui sent le moisi

Ton ombre livide

Erre sans sursis

 

Privé de lumière

Ton livre reste fermé

Recouvert de poussière

Point d'histoire à conter

 

La folie n'est pas loin

Elle guette intransigeante

Elle t'épie dans un coin

De ses humeurs changeantes

 

Tu traques en vain l'oubli

Car la mémoire ressasse

Les mensonges sans répit

Les actes dégueulasses

 

Engeolé par ta conscience

Tu étouffes dans le soufre

La vérité est une science

Que seul l'intègre souffre

 

Tu pourris en toi-même

La gorge dans un étau

Plus jamais tu ne t'aimes

Tombée la croix de Tau

 

Au pied de l'escalier

Tu songes à la surface

Il te faudrait parler

Il faudrait te faire face

 

Crever enfin l'abcès

Que le mal dégorge

Faire sortir ce secret

Coincé dans ta gorge

 

Libérer ta parole

Pour secourir ton âme

Que tes pensées s'envolent

Au-delà de ce drame

 

 

Iso Bastier

18/10/23


Les corps



Les corps

 

Qui a raison ?

Qui a tort ?

La guerre est une passion

Qui fait parler les morts

 

La paix n'est qu'un décor

Mobile comme la mer

Que les embruns dévorent

Un répit éphémère

 

Car il y a de la haine

De la colère, des rancœurs

Dans la nature humaine

Qui manque souvent de cœur

 

Qui a raison ?

Qui a tort ?

La guerre est une passion

Qui fait parler les morts

 

La paix n'est qu'un idéal

Que seuls les sages caressent

Mais la cité infernale

Élit ceux qui agressent

 

Les autres marchent au pas

Dans un silence assourdissant

À force de faire profil bas

Ils participent en obéissant

 

Qui a raison ?

Qui a tort ?

La guerre est une passion

Qui fait parler les morts

 

Et fait taire les vivants

Tant qu'il y en a encore

Pour mieux fournir les rangs

Puis empiler les corps

 

 

Iso Bastier

18/10/23


mardi 17 octobre 2023

La danse

 



La danse

 

Le soir s'immisce entre nous

Pour une danse crépusculaire

Nous dansons malgré tout

Hors du monde en colère

 

Doucement, tendrement,

Sans besoin de musique,

Nous devenons mouvements

Loin de ce monde cynique

 

Mon corps tout contre toi

Laisse place à mon âme

Je ressens ton cœur qui bat

Dans tes bras, je me pâme

 

La lune nous sourit encore

Du haut de son mystère

Nous dansons, corps à corps

Malgré la guerre sur Terre

 

Blottie au chaud dans tes bras

Je laisse place au bonheur

Bien que le monde n'aille pas

Nous valsons vers ailleurs

 

L'un contre l'autre, aimés,

Nous irradions de la lumière

Nous voyageons par la pensée

Loin de ce monde amer

 

C'est que l'amour vient à bout

Des horreurs qu'on nous sert

Nous danserons à genoux

Même couchés par terre

 

La nuit s'immisce entre nous

Comme il était à prévoir

Mais nous dansons malgré tout

Nous n'avons pas peur du noir

 

 

Iso Bastier

17/10/23


Enfantillages




Enfantillages

 

La pluie sur ton visage

Prend d'étranges virages

Miroir des expressions

De l'eau parcourue de frissons

 

Il y a de la rage

Se décompose le paysage

Quand la lave fait irruption

Avalant tout sur son passage

 

Il en faut du courage

Pour rester toujours sage

Quand le cœur est en fusion

Qu'il déborde sous la pression

 

Il faut prendre de l'âge

Que l'esprit sorte de sa cage

Dépasse regrets et déceptions

Laissant le corps en nage

 

La pluie sur ton visage

Séchera après l'orage

Du soleil poindront des rayons

Pointus en mines de crayon

 

Reprendra ton voyage

Comme la course des nuages

Repoindra l'horizon

Ses espoirs et enfantillages

 

 

Iso Bastier

17/10/23


Credo




Credo

 

Il est toujours trop tard

Quand les secours arrivent

On se bat avec espoir

L'abandon est une dérive

 

Il fait déjà nuit noire

Quand les gyrophares s'avivent

On espère plus les voir

Passer sur l'autre rive

 

Manque d'anticipation

L'avenir est un brouillard

Qui génère trop de questions

Pour celui qui ne veut pas voir

 

Manque de compréhension

Le passé est un buvard

Qui boit pour faire illusion

Afin de réécrire l'histoire

 

Il est toujours trop tôt

Quand les murs se dressent

Comme pour nous faire la peau

Nous confronter à nos faiblesses

 

Le jour met un manteau

Sa crudité nous stresse

L'aurore n'a pas de pot

Quand le soleil se blesse

 

Manque de réaction

Que gémissements et trémolos

On se répand en compassion

Pour mieux faire le gros dos

 

Manque de conviction

Chacun doit porter son lot

Ses épreuves, sa passion

À chacun son credo

 

 

Iso Bastier

17/10/23